Socle commun : apprendre à lire l’actualité

Tout d’abord l’idée d’écrire cet article m’est venue en lisant un article sur ce blog.

En introduction, je vous laisserai regarder cette fameuse information du 9 janvier.

« Le graphique fait peur, une chute vertigineuse de l’euro, de quoi bien effrayer quelques auditeurs assidus de ce journal télévisuel. »

Mais avant toute chose regardons la vidéo, positionner le curseur à 1’30 et vous verrez le fameux graphique.

Avez-vous remarqué l’échelle utilisée? Déjà on ne montre qu’une portion de l’axe des ordonnées et l’échelle est extrêmement réduite, nous parlons d’une chute de … deux millièmes d’euros. Bien sûr pour des échanges se livrant en milliard d’euros la somme peut-être substantielle, mais ne parlons pas de crise! Y-a-t-il vraiment une utilité à ce graphique?

I. Le socle commun

C’est sans doute cela, l’utilité du socle, se faire sa propre opinion des faits d’actualités. Être autonome, pouvoir analyser l’actualité sans dépendre de quiconque.

Depuis quelques temps,  France 2 se livre à un exercice intéressant, une analyse des faits est proposée, ce n’est pas Pujadas qui nous livre son interprétation mais un « expert« , sorti de je ne sais d’où.

On a envie de faire confiance, mais quand on sait que l’autorité experte est sans doute la plus haute autorité qui soit. Voyons l’expérience de Milgram, qui sous la simple emprise d’une autorité experte arrive à ce qu’un une personne tue un autre homme, doit-on se laisser aller?

Bien sûr, l’analyse de ce graphique requiert bien un recul mathématique, le graphique apparaît rapidement, il faut être prêt à regarder l’essentiel : « l’échelle« , alors que notre œil serait bien plus attiré par l’aspect globale de la courbe.

Préparer nos jeunes enfants à analyser l’actualité requiert bien plus qu’un bagage mathématique :

– une culture historique et géographique.

– un bagage mathématique (voir l’aspect statistique)

-un bagage culturelle scientifique (dans l’art de pratiquer les sciences)

– être autonome, prendre des dispositions pour rechercher l’information.

La société moderne s’oriente vers une politique du chiffre, bien entendu pour analyser les chiffres (et dire que chiffre vient de sifra qui a aussi donné le mot zéro et « chiffré« , dans le sens « crypté« , « qui sème la confusion« !),  ce bagage mathématique est donc très important.

 

 

II.Un exemple Russe

La semaine du 4 au 11 mars 2012, lors des élections présidentielles russes, la chaîne info pro-Poutine Russie-24 a montré que la participation dans la région de Rostov était de 146% : « Russie Unie » a récolté 58.99% des voix, le Parti communiste 32.96%, « Russie Juste » 23.74%, le Parti libéral-démocrate 19.41%, « Pomme » 9.32%, « Patriotes de Russie » 1,46% et « Juste cause » 0.59%. Total : 146.47%.

blank

III. Un exemple de chez nous

Voici un graphique qui a été présenté par François Lenglet pendant l’émission Des paroles et des actes sur France 2 le 12 janvier 2012. Il voulait montrer les dépenses publiques en pourcentage du PIB, aux États-Unis, en Allemagne, dans la zone euro et en France.

blank

Tout d’abord, on remarque que la borne supérieur de 100% n’est pas visible.  La France paraît au premier abord, très en difficulté, les dépenses publiques nous paraissent équivalentes au PIB, mais il n’en est rien.

Et ce n’est pas fini! Regardons les rectangles des États-Unis et celui de la France, celui des Américains est deux fois moins grand par rapport au  notre, ce qui suggère que pour les pourcentages c’est le même rapport! 41,9% est-il deux fois moins grand que 56,2%?

Mais encore mieux, en regardant les rectangles on pense que la différence entre les États-Unis et l’Allemagne est la même qu’entre la zone Euro et la France, or pour l’un c’est 3,6% et pour l’autre c’est 7,4%…

Voilà ce qu’on aurait dû voir…

blank

Bref un graphique qui ne voulait rien dire… Que penser du message que l’on souhaitait nous faire passer?

 

 IV. Les médias…

Les médias de plus en plus proposent une analyse avec des schémas  à l’appui pour permettre de rapidement jauger la situation, malheureusement parfois les illustrations sont alambiquées et les explications complètement floues, ce qui ne nous donne pas d’autres choix que de croire.

Enfin pour finir, régulièrement les journalistes parlent de pourcentages d’augmentation ou de réduction sans jamais préciser la date de référence sur laquelle on s’appuie…

 

Il est primordial de créer un esprit critique chez nos élèves, il faut leur donner les moyens de se faire leurs propres opinions….

(voir aussi)

blank

sources utilisées :
http://images.math.cnrs.fr/Graphiques-frelates.html
http://www.apprendre-en-ligne.net/blog/index.php/2012/03/10/2012-taux-de-participation-146

A propos de l'auteur : blank

Enseignant de mathématiques : collège Belle-vue de Loué Membre de l'équipe du "Rallye mathématique de la Sarthe" blog : mathix.org

a écrit 1113 articles sur mathix.org.

Vous avez aimé cet article ? Alors partagez-le avec vos amis en cliquant sur les boutons ci-dessous :

Licence Creative Commons

Un commentaire

  1. Je navigue sur votre blog et je trouve ce billet très intéressant.

    Mais avant de dispenser un enseignement mathématiques de qualité (c’est essentiel, c’est certain)aux élèves, aux enfants en général d’ailleurs (!), il serait utile de les former aux techniques utilisés par les médias qui s’apparentent à bien des égards à celles de la pub…

    L’information est devenue rapide, concise et déformante. Là où il faudrait entrer dans les détails, décortiquer les graphiques, décoder les discours des « experts », les conclusions sont assénées avec tellement de certitude que peu de gens sont à même de détecter parfois de l’évidente supercherie ou de la subtile inexactitude.

    Malheureusement, nous vivons une époque où le jugement doit être immédiat et où l’analyse sérieuse et complète n’est pas forcément valorisée.

    Le socle commun des connaissances prévoit cet enseignement et cette capacité de jugement et je m’étonne toujours que ça n’intéresse pas davantage les élèves.
    Mais effectivement cela réclame une culture importante historique, économique, géopolitique, mathématiques…).

    En seconde, la matière « sciences économiques » l’aborde mais sans favoriser le jugement critique qui serait nécessaire.
    En IEF, nos enfants ont eu cette chance de ne pas être contraints au « politiquement correct » et de faire preuve de jugements tout à fait intéressants et pertinents!

    ValérieJ

Rejoignez la conversation

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *