Catégorie : Réflexions

Pédagogie inversée … mon premier petit test

Avant les vacances, j’écrivais un article sur la Khan-académie, j’ai eu certains retours d’enseignants qui m’ont cru contre le numérique. Etrange, quand même là où je précise que j’ai créé deux vidéos pédagogiques sur les relatifs, et bien entendu sans même parler des  problèmes DUDU!

En fin d’article, j’informais que j’expérimenterai l’apprentissage par vidéo chez soi.

J’ai d’abord donné la vidéo à voir à mes élèves pendant les vacances de la Toussaint. La voici pour rappel :

Journée 1 :

Rentré de vacances, je pose la question fatidique : « Qui a vu la vidéo? »

La moitié de la classe seulement…Zut! J’ai donc dû revoir la vidéo (pas grave j’avais prévu quand même de la revoir).

L’engouement des élèves qui ont vu la vidéo pour cette dernière, m’a permis néanmoins d’avoir l’adhésion de facto du reste de la classe. (l’effet de groupe).

En regardant la vidéo, les élèves sourient, chantonnent le générique de western, rigolent sur les batailles, et le film se termine.

« C’est tout? C’est simplement ça les relatifs? »

Le résultat est convaincant, les élèves manipulaient déjà très bien le concept d’addition des relatifs.

L’expérience est complètement réussie, et je crois que ce sera une vidéo que je reprendrai l’année prochaine.

Une série d’exercices se poursuit sur des additions simples puis doubles ….

Journée 2 :

Je souhaite passer à la notion de nombre relatif décimal.

Je vocabulaire sciemment passe de « 5 jetons noirs » à « 5 négatifs » et de « 4 jetons blancs » à  » 4 positifs« .

Les élèves ne sont pas choqués, certains ne s’en rendent même pas compte.

Vient la seconde partie de cours, j’attaque une expression du type (+4) + (-1,5).

Le changement de vocabulaire facilite la transition :

« 4 positifs combattent 1,5 négatifs »

 » On regarde ce qu’il reste après le combat » (l’idée de la soustraction est sous-jacente et maîtrisée)

Je donne à voir le second opus.

Journée 3 :

Tous les élèves ne l’ont pas vu.

Je la revois donc avec eux, une fois puis une seconde puis une 3e fois en faisant des pauses.
Donc même si les élèves avaient vu la vidéo, je ne suis pas certain que cela aurait été efficace, ici, soit je conclue que la vidéo est mal faite, soit que l’utilisation de pédagogie inversée ne peut s’étendre à tous les concepts surtout quand ces derniers sont difficiles. Mais juger sur cette simple vidéo est hâtif.

La vidéo passe moins bien, l’idée de contrat est validé par certains mais pas par tous.

J’écris l’opération suivante :

(+4) – (-5)

A la phrase : « Je souhaite tuer (enlever) 5 négatifs, …« , tous les élèves savent et répondent en chœur qu’il faut « ajouter 5 positifs« .

Mais ils ne comprennent pas vraiment pourquoi « il faudrait le faire« .

J’explique par un retour aux mathématiques que l’addition a plein de vertus comme le changement d’ordre des termes.

Tous n’ont pas été convaincus.

On est entré dans la phase de déstabilisation (tant évoquée en IUFM) lors de l’acquisition d’une nouvelle notion, certains élèves peuvent décrocher. Il faut donc rassurer et faire attention à ce que l’on dit et être vigilent aux soupirs des élèves.

À force de pratique, de rappels, et d’entraînements, on a fini par y arriver. (2 semaines en tout pour ce chapitre).

Tous les élèves maîtrisent la notion.

Des petits cris du genre de guerre « Ahhhhhhh » quand deux termes du camps opposés sont à ajouter, s’entendent encore….

Epilogue

Une collègue m’a demandé la permission d’utiliser la vidéo.

Certains de ses  élèves avaient décrochés lors de la fameuse phase de déstabilisation, elle leur a montré la vidéo et certains se sont accaparé l’image mentale. Elle en a eu l’utilité non comme la pédagogie inversée mais plutôt comme une aide.

J’ai gagné un peu de temps avec mes élèves en leur montrant avant la vidéo, cependant j’aurais du mal à évoquer le gain réel précis.

La vidéo s’est révélé être un bon outil, l’expérience est à poursuivre. (je ne sais pas pour l’heure si j’aurais le temps d’en faire d’autres, les problèmes DUDU me prenant pas mal de temps)

Affaire à suivre ….

 

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Pédagogie inversée

Dernièrement j’ai vu un reportage sur un enseignant d’histoire géographie qui faisait de la pédagogie inversée en classe.

Vient ensuite un collègue toujours d’histoire géographie qui me parle de la khan-académie qui fournit plein de vidéos pour les enseignants qui font de la pédagogie inversée…

Tout d’abord la pédagogie inversée, c’est quoi?

Comme son nom l’indique la pédagogie inversée consiste à inverser les moments pédagogiques en classe avec les moments des devoirs à la maison (en théorie ce n’est faisable qu’au secondaire puisque le travail à la maison en primaire est à priori interdit).

La découverte d’une notion se fait à la maison, tandis que les exercices se font en classe sur des rythmes individualisés.

Les explications sur les notions se fait à la maison par l’intermédiaire de vidéos mises en ligne, à l’issue parfois desquelles un questionnaire internet est donné pour vérifier ou voir si l’élève a compris ou vu la vidéo.kkLe travail en classe est plus aisé, on demande aux élèves s’ils ont compris, ceux qui n’ont pas compris se font expliquer par ceux qui ont compris et les exercices se font en autonomie. La position de l’adulte est différente, il peut juste se concentrer sur les faibles.

Sur le papier, l’idée est extrêmement séduisante puisque l’on pousse les élèves vers de l’autonomie, et pour le travail à la maison tous les élèves sont égaux.

Cependant ….

Oui cependant…

Cela suggère que tous les élèves aient internet .

Déjà dans mon collège, ce n’est pas le cas….donc je ne peux expérimenter ce projet, déjà que faire les problèmes DUDU c’est hard, je m’en sors en leur disant d’aller ponctuellement au CDI pour les revoir et noter les infos. Mais je ne peux pas leur demander d’y aller quotidiennement.

Cela accentue donc l’inégalité dans l’école de part la fracture numérique.

Donner des vidéos à voir …

Pourquoi pas! Mais on peut aussi voir une approche plus fructueuse, par exemple en partant de ce que savent les élèves, de partir des images mentales que possèdent les élèves avant d’amener les nôtres et de faire un mix de tout ça. Car partir de ce que savent les élèves est plus riche. Les ponts entre souvenirs, certitudes, acquis et nouvelles notions sont plus solides car ancrés dans l’expérience que possède l’élève.

Un boulot monumental

Déjà à faire juste deux pauvres vidéos, je me suis cassé les dents plusieurs jours sur le scénario, le montage et encore je ne suis pas pleinement satisfait du résultat, parfois j’ai l’impression d’y aller aux forceps …

Mais un ami m’a parlé de vidéos disponibles distribuées par la BNF et la khan-academy qui prône la classe inversée.

250 vidéos sont disponibles dès maintenant, 800 promises pour la fin de l’année et du niveau collège et pour seulement les maths.

J’étais ravi en entendant ça, mais quelle déception!

Les vidéos sont, certes, de bonne qualité, mais ne me correspondent pas du tout. Là où je créé de l’image mentale, ici, on lie les concepts mathématiques par des théorèmes et des démonstrations. Pour moi, c’est beaucoup trop lourd, peu pédagogique et faut le dire barbant (ce n’est que mon avis)

Je vous laisse juger par cette vidéo, sinon le reste  se passe ici.

Bien entendu, je ne jette nullement la pierre à la khan-académie.

Je soutiens ce genre d’initiative, car elle se veut garante d’un partage universel des connaissances, tout membre du libre le souhaite.

Mais dans l’enseignement comme la programmation, une barrière existe entre ceux qui créent pour leurs propres besoins et ceux qui souhaitent réutiliser les produits. Ils faut qu’ils aient les mêmes manières de « voir les choses« . Je m’explique, ici moi, j’aurais juste fait une vidéo où l’on découpe le parallélogramme en rectangle pour montrer comment se construit la formule de l’aire du parallélogramme.

De plus les signes « x » sont remplacés par des « . ».

Finalement, je pense la vidéo imbuvable pour un élève.Peut-on décemment penser qu’il va regarder la vidéo sans décrocher au bout de 4mn?

 

En fait cela suggère qu’à chaque prof, il existe une quasiment une manière unique de « voir » les mathématiques…

Je ne parle pas du vocabulaire qui parfois n’est pas adapté à certaines classes, je me vois très mal parler de triangle « isométrique », je suis sûr que je perdrais déjà du temps sur ce simple mot.

Et puis que penser des vidéos, de l’accès à la connaissance par l’internet?

L’initiative de la khan-académie est géniale, mais elle me gène un peu sur l’impact qu’elle peut avoir sur la société.

Elle porte aussi insidieusement, le message que la connaissance peut très bien passer par les vidéos et uniquement cela.

Sans rentrer dans le « les profs c’est super utile car on est les meilleurs« , je crois fermement que la position de l’adulte référent auquel on peut poser des questions, qui peut rassurer, dynamiser, recadrer est importante. Car l’enjeu de l’école n’est pas simplement d’instruire (autrement on l’appellerai l’instruction nationale) , c’est celle aussi d’éduquer, de rendre autonome, d’aider par le dialogue (que ce soit en motivant, en grondant ou en encourageant)  ou même par le simple fait d’être là, on est aussi un repère.

Malheureusement ce genre d’initiative, annihile l’image de notre métier et le recale au rang du transmetteur de savoir, on est tellement autre chose.

Et puis concevoir ses activités, pour rendre vivant un cours, pour jouer, donner des challenges, impliquer les élèves dans des travaux de groupes, des projets . Toute cette interaction sociale que l’école apporte aussi. Tant de choses qui nous différencient de ces simples vidéos….

Le concept n’est pas mauvais, mais n’en abusons pas.

En fait, je crois que le support de la vidéo est génial, se créer un stock de vidéos ludiques et explicatives en complément des cours, me paraît être une évidence.

Comme revoir un cours déjà fait, un peu à l’instar des MOOCs, vous savez ces cours qui sont filmés? Ce concept adapté à la fac, très proche de la pédagogie inversé, car les étudiants voient les cours et font des heures de TD (travaux dirigés où l’on fait des exercices).

Cependant, ici on s’adresse à des étudiants, déjà autonomes, les concepts sont pointus et on sait l’étudiant capable d’aller fouiller les informations manquantes ailleurs (à la BU, sur le net etc….) ce qu’un élève lui ne saurait faire au collège , on doit lui apprendre à le devenir.

 

Bref, l’idée est à creuser, mais ne saurait être utilisée telle quelle en maths avec les vidéos de la khan-académie.

 D’ailleurs, je compte expérimenter cette idée avec les nombres relatifs en 5e.

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Plus de brevet, et si on y pensait?

 [sommaire]Voilà, je reviens d’un séminaire sur le socle commun organisé le 28 mars par CRAP, Cahiers pédagogiques, SGEN-CFDT et Se-UNSa. Journée intéressante qui s’est terminée par le venue d’un représentant de la DESCO qui a écouté nos proposition pour la refondation de l’école. Je remercie d’ailleurs le Se-Unsa de m’y avoir invité.

Une journée pour construire l’école de demain.

L’après-midi, je me suis retrouvé dans un atelier portant sur la validation du socle commun. La question s’est posée sur la pertinence de notre brevet. J’ai même repris le lendemain cette discussion avec le secrétaire de mon collège qui  a apporté son point de vue de parent et d’agent administratif.
En voici les grandes idées.

I. LE BREVET POUR QUI?

Diplome national du brevet
Questionnons l’évidence! On me répondra « les élèves bien sûr! Qui d’autre?« . L’argument du premier examen officiel, ce fameux examen que beaucoup d’élèves doivent passer pour s’ « habituer » à en passer : le rite initiatique…..

L’argument un peu bancal se tient, il est vrai que cet examen est une sorte de point culminant de la scolarité obligatoire, il en est en quelque sorte l’achèvement, la passation d’une épreuve finale correspond au rite instigateur de changement chez notre élève mais ceci relève d’une autre question que j’analyserai plus tard.

Afin de préciser, mon interrogation, j’en soulèverai une autre :

Quel usage du brevet, les élèves en font-ils?

Réfléchissons bien, ceux qui vont au lycée, il n’est pas obligatoire et généralement les élèves qui y vont avec l’aval du conseil de classe n’en auront pas besoin dans leur avenir proche car ils passeront d’autres diplômes : CAP, BAC-Pro,BAC-technologique, BAC-général…

Mais alors pour qui devrait-il être important?

Simplement pour ceux qui quittent le système scolaire à l’issue de la 3e. C’est leur seul diplôme et pour la recherche d’un apprentissage, les « patrons » demandent à ce qu’ils l’aient. Et pourquoi le demandent-ils? Parce qu’il n’existe que ce diplôme!

Donc la population d’élèves pour qui le brevet est essentiel se résume aux élèves qui vont quitter le système scolaire. D’ailleurs c’est un argument en faveur du maintien du brevet ou du moins d’un diplôme couronnant cette scolarité.

II. REPENSER LE BREVET ?

brevet-college-549727-jpg_376846A l’heure actuelle, le brevet se résume grossièrement, à 3 épreuves écrites, une orale et une moyenne (sans compter l’Histoire-Géographie) de l’année de 3e.

Est-ce un indicateur fiable pour les « patrons » qui recherchent aussi des élèves ayant de l’autonomie?

Vous savez, ces fameux élèves « dégourdis » que nos patrons reprendraient en stage plusieurs fois, s’il le fallait.

L’autonomie, la prise d’initiative, la capacité à mener un projet sont autant de compétences importantes en milieu professionnel, et pour ces élèves qui vont s’y confronter assez tôt, il est essentiel qu’elles soient visibles.

Vous voyez où je veux en venir ? Tout simplement : le socle commun…. ou plutôt les piliers 6 et 7 de ce socle.

Le brevet lui, n’atteste que de la validation d’un certain nombre de connaissances, mais en aucun cas, de savoir-faire et bien peu de savoir-être.

Bref, nos élèves qui vont sortir du cursus scolaire parce qu’ils ne sont pas « scolaires » ne pourront pas mettre en avant des compétences qu’ils ont.

III. OUI MAIS CELA NE PEUT PAS S’ÉVALUER LORS D’ÉPREUVES FINALES!

C’est le nœud du problème, ces compétences ne se valident que sur des projets que l’on peut seulement effectuer sur l’année en cours ou passées.

Par exemple, lors des épreuves du rallye mathématiques, la prise d’initiative est importante, et l’on repère rapidement ces compétences acquises chez certains élèves, généralement ceux qui ne sont pas « scolaires ».

Le brevet est-il donc utile sous cette forme? La validation du socle-commun ne revêt-elle pas une meilleure adéquation à la demande des « patrons pour les apprentissages »?

Et si l’on rendait aussi important ce socle que le brevet, voire même plus important?

Il faudrait un « examen » qui valorise ces élèves qui ne peuvent pas être évalués sur des épreuves ponctuelles.

 IV. EN PLUS, LE BREVET PARASITE LE TRAVAIL DU SOCLE

C’est le constat fait en atelier, les professeurs d’histoire-géographie font leurs programmes de 3e au maximum car le brevet nécessite des connaissances de 3e. Ils n’ont que peu de temps pour créer des travaux de groupe, ou même des travaux en autonomie.

En mathématiques, on est un peu plus à l’aise, les programmes ne sont pas trop lourds et le brevet ne concerne que quelques points du programme de 3e mais surtout celui de 4e. Mais néanmoins cette crainte est toujours présente (et si le brevet était plus dur?)

image020Mais c’est un fait, la peur de ne pas finir le programme parasite les bonnes volontés de vouloir faire des travaux laissant de l’autonomie à l’élève, avoir du temps pour qu’il se trompe! En gros, pas le temps, Je dois me concentrer sur  toutes les connaissances qu’ils doivent avoir même très pointues.

Bref, le socle commun de connaissance ne peut pas se travailler s’il y a à la fin un examen faisant un état d’acquisition du programme (et non du socle) à la fin de la scolarité obligatoire.

Donc la suppression du brevet  ou un abaissement du brevet au socle semble inévitable.

Bien entendu garder à l’esprit que le programme est obligatoire pour les élèves continuant la scolarité doit rester à l’esprit!!

Je m’insurgerai du contraire. Mais accepter que des élèves n’aient pas le programme et n’aient que le socle commun et qu’ils puissent être valorisés à la fin de leurs scolarité en 3e, me paraît être une évidence!

V. OUI MAIS LE BREVET EST NATIONAL ET PERMET AUSSI DE VOIR PAR LES STATISTIQUES LES COLLÈGES QUI ONT BESOIN D’ « AIDE »!

Oui c’est certain, un examen national permet par le biais des statistiques de voir les collèges qui ont des taux faibles de réussite au DNB.

J’y mettrais un bémol, la docimologie des examens montre aussi que des écarts existent entre des correcteurs sur des copies identiques et ce malgré un barème précis. Mais c’est ce que l’on a de plus « objectif ».

Mais alors pourquoi ne pas penser à des évaluations nationales à la place du brevet un peu comme les évaluations de 6e? Histoire d’avoir des indicateurs de réussite? Pourquoi ne pas faire ces évaluations après la 3e? (Certains pourraient se demander, mais les ceux qui en sont sortis ? Et bien, ils ont trouvé leurs voies et ne sont normalement pas déscolarisés, donc …)

VI. DONC PAS D’EXAMEN FINAL? QUID DE LA FIN DE SCOLARITÉ AU COLLÈGE?

portfolioC’est aussi l’enjeu de la 3e, l’aboutissement de la 3e. Certains confrères de l’atelier ont lancé des idées, entre autres celle du porte-folio m’a beaucoup séduite.

Il s’agit en fait d’un classeur de réussite, où les élèves mettent leurs projets réussit (allant des projets aux contrôles réussis.).

En harmonisant la forme de ce classeur au niveau national sans doute pourrions-nous créer le « chef d’oeuvre » scolaire personnel de chaque élève? Un rite initiatique où cette œuvre devrait être montrée, affichée.

Une idée à creuser….

Bien entendu ce sont des idées,

j’aurais peut-être changé d’avis d’ici là,

mais cette perspective de la disparition du brevet

pour affirmer le socle commun me plaît vraiment  pour l’instant.

Et vous?

 

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Une évolution surprenante liée aux Tices aux USA! Et si on allait dans la même direction?

Je lisais il y a quelques temps un article qui m’a alerté et m’a beaucoup questionné.

computer-23288_640 computer-23283_640Afin d’éviter la relecture de cet article, il s’agit du choix que 45 états des États-Unis ont faits, à savoir de ne pas rendre obligatoire l’apprentissage de l’écriture manuscrite cursive en primaire et de remplacer ce module par l’apprentissage de Word.

/!\On parle bien de l’écriture cursive à contrario de l’écriture en script (détachée) qui elle reste dans l’apprentissage donné à l’enfant.

 

 

Surprenant, n’est-ce pas?

Malgré tout,  je ne sais pas trop quoi en penser.

notepad-2008_640C’est sûr, on va vers une numérisation de notre environnement, les outils numériques ont déjà colonisé l’école, les maisons, les hôpitaux, les voitures,etc.

Dans nos habitudes, si on n’utilise pas le mail, on préférera toujours écrire son CV ou une lettre à l’ordinateur quitte à l’imprimer, car « on ne fait pas de rature« , on organise rapidement les écrits par du copier-coller. Et puis c’est tellement mieux le correcteur orthographique et grammatical, on est plus efficace et on fait « moins d’efforts« .

L’écriture manuscrite cursive devient donc désuète, non?

La question se pose donc : Est-il utile de continuer à apprendre l’usage de l’écriture manuscrite cursive ? (à contrario de l’écriture en script)

En parlant à des collègues, professeurs des écoles, j’ai eu le droit à une levée de bouclier : « N’importe quoi! » « Pfff, mais où va-t-on? »

Et si, c’était en fait l’évolution de société, celle qui nous fait rendre « has been« ? Celle où l’on réagit comme les petits vieux réfractaires : « C’était mieux avant!« 

computer-33521_640Pour preuve, on autorise à certains dys l’usage de ordinateur  en classe. Ce dernier a d’ailleurs envahi les universités, où le portable devient de plus en plus courant. Pourquoi ne pas accompagner le mouvement?

La vraie question serait de se poser le problème du développement cérébral lors de l’apprentissage de l’écriture manuscrite cursive et encore, quand je lis l’article, je trouve dommage que l’expert se dise « quand on lit, on écrit » et qu’il soit contre, alors qu’en aucun cas, il n’est mentionné que les élèves n’apprendraient pas l’écriture tout court.

Il ne s’agit en aucun cas, de ne pas apprendre l’écriture! Simplement de se limiter à l’écriture détachée. L’écriture en script reste une écriture manuscrite très répandue. Même parfois, on mixe l’écriture cursive et en script. D’ailleurs, beaucoup de mes élèves l’utilisent naturellement, généralement, sans sexisme, les filles écrivent comme cela.

Pourquoi ne pas apprendre l’usage de l’ordinateur tôt, savoir bien utiliser le traitement de texte (openoffice ou libreoffice)? Voir même des outils collaboratifs (voir cet article)?

La seule contrainte est bien entendu l’outillage des familles. Dans les milieux ruraux ou dans les milieux défavorisés en général, il existe encore des familles qui n’ont pas accès à l’ordinateur (je ne parle pas d’internet). Passer le pas, marginaliserait ces familles encore plus qu’elles peuvent l’être déjà, il faudrait donc réfléchir à comment les « outiller« .

Mais là, c’est une autre question.

 

 

 

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Le travail du soir… une vraie question

[sommaire]billet-humeurIl n’y a pas longtemps se tenait la journée « portes ouvertes » de mon collège. J’étais positionné en salle informatique pour faire la démonstration de l’utilisation du serveur Scribe, e-lyco (oups pas de connexion internet au collège le samedi!!) et des caméras-documents (appelées visualisateurs).

Les parents étaient plus nombreux que d’habitude, plus réceptifs que les années passées. Certains parents m’ont même parlé d’eux-même de logiciels libres, qu’une utilisation de logiciels gratuits permet aussi aux enfants de les installer chez eux! Génial que des parents puissent se saisir d’un tel problème, non?

education-25155_640Mais vers la fin, deux parents sont restés, et m’ont parlé, inquiets, des devoirs à la maison. Connaissant un peu le sujet, je leur ai indiqué aux premiers abords que la loi (décret de 1958 de mémoire) ne concernait que les écoles primaires et en aucun cas le collège ou lycée.

La maman me faisait part de difficultés pour suivre le travail de ses enfants, ses horaires et ceux de son mari étaient incompatibles avec une aide au travail le soir. C’est une situation que nous rencontrons de plus en plus souvent.Je lui ai dit un de mes arguments, qu’un élève doit gagner en autonomie, construire sa capacité de travail (effort face à la tâche) et que le travail le soir permet aussi d’y arriver. Mais en tant qu’enseignant, les exercices allaient néanmoins vers un nombre plus étroit d’exercices.

La matinée se termine, je rentre au Mans avec la CPE et j’évoque ce passage. Sans m’y attendre, on a discuté longtemps, nos points de vues divergeants complètements. Je vais donc commencer par ce quoi, on était d’accord et terminerait par nos solutions totalement opposées.

I. Le travail du soir : un élément discriminant pour les élèves.

Le (manque de) temps

On le vit au quotidien, cela se ressent, les élèves qui ont du soutien de la part de leurs parents pour le travail le soir sont moins perdus, les exercices faits généralement avec soin, et le cours à peu près appris. Du moins, quand il y a des alertes, les parents se saisissent du problème et généralement suivent de près le travail du soir de leurs enfants. C’est ce que j’appellerais la collaboration des parents avec l’école, l’enseignant aide en classe et les parents aident chez eux, on tire un bilan lors des rencontre parents-professeurs (ou avant si ça va de mal en pis).

Une relation centrée sur l’élève, ce dernier est encadré et soutenu.

Évidement, les parents n’ont pas tous le temps de se consacrer tout le temps à cela, la plupart du temps, ils laissent d’abord leurs enfants en autonomie et ne réagissent seulement quand il y a des soucis.

Et il y a ceux qui n’ont jamais ce temps. Parfois les enfants ont une telle volonté que cela compense cette absence, parfois non. Et là, on retrouve des élèves décrocheurs, perdus, ne sachant pas comment faire, ne voyant que peu ou pas d’intérêt.

Bien entendu, on peut les conseiller, les secouer, mais nous ne sommes pas là le soir à les aider!

Pas les mêmes aptitudes pour les aider

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En milieu rural, je crois que c’est encore plus criant de vérité, on retrouve beaucoup de parents démissionnaires parce qu’ils étaient par exemple « nul en maths« , et ce même sur des notions de 6e. Certains parents avouent même avec humilité qu’ils ont arrêté les études tôt et que sur certains points leurs enfants est plus avancés qu’eux.

Comment les aider quand on ne comprend rien? Comment un enfant peut se dire, je vais y arriver si quand il demande de l’aide à une autorité de référence, on lui dit « je ne sais pas« ?

Là aussi, on voit le grand écart entre les élèves soutenus par une famille au niveau culturel élevé, où les enfants sont plus stimulés que d’autres.

Un milieu (dé)favorisant

Des familles au niveau social élevé peuvent avec certitude émanciper leurs enfants par un accès à la culture aisé. Ce bagage culturel aide sans conteste ces élèves. On leur demande avec le socle de plus en plus de confronter aussi leurs avis avec eux des autres. En étant plus « éclairé », on argumente plus facilement, on a « les billes » pour poser un raisonnement construit.

Bref, dans ce fonctionnement, l’école est très inégalitaire. Collège unique? Non, L’école pour tous? Certainement pas.

II. Des solutions possibles?

a) Pas de travail à la maison.

C’est la solution de ma confrère CPE. Elle s’aligne en fait sur l’idéologie de Franck Lepage. Celui de modifier l’ascenseur social pour ralentir ceux qui peuvent aller plus vite (par un milieu social favorisant), afin que les élèves issus d’un milieu défavorisé les « rattrapent ». Cette idée est évoquée assez rapidement lorsqu’il parle du parapente. C’est sans doute la seule idée que je réfute, et pourtant qui m’a fait réfléchir.

Pourquoi un homme défendant l’éducation populaire en vient à cette idée un peu contre productive? Y-a-t-il des préjugés à cette idée qui m’empêche de concevoir cela?

Je n’ai tout d’abord pas d’idées arrêtées, mais je ne suis pas convaincu.

L’idée que je me fais de l’éducation est justement d’aller tous ensemble vers le même objectif, non en ralentissant les plus forts mais en aidant les plus faibles.
FrLepage
Arrêter les devoirs? C’est aussi arrêter l’éducation par les projets de classe qui peuvent demander de l’investissement chez soi. Et puis il y aura toujours des élèves qui feront des devoirs chez eux, soit par obligation des parents (ou d’un soutien scolaire payé), soit par envie. L’envie qu’un enfant peut avoir à apprendre à aller plus loin que les autres.

Donc en somme, on ne pourra jamais interdire les devoirs, on ne répondra juste qu’au besoin de parents qui ne peuvent les aider, et cette réponse est loin d’être la meilleure, car on accentuera la différence (pas des élèves, mais des différences sociales).

« Oui mais dans nos pratiques, on ne prendra pas appui sur les travaux domestiques des élèves!! »

 

Mais par différenciation afin d’éviter que les élèves s’ennuient (un élève qui s’ennuie perturbe la classe plus facilement) vous le ferez allez plus loin, donc en somme les différences existeront, et les devoirs à la maison se feront toujours et sauf que là, vous ne les contrôlerez plus. Vous ne choisirez plus la progression des acquis des élèves.

*On peut penser que c’est mieux, qu’un enfant puisse apprendre de lui-même des concepts nouveaux sans l’aide l’adulte référent. Là sur ce point, je ne suis pas sûr, parfois un enfant peut construire un concept erroné ou dépourvu de sens qui parfois demande encore plus de temps de le déconstruire pour mieux le reconstruire et peut « embrouiller » d’autant plus.

Bref une fausse bonne solution pour moi, mais comme je l’ai dit, je n’ai pas arrêté mes idées..

b) Une étude du soir.

concentration-16032_640Voilà l’enjeu véritable.

Créer une plage horaire pour les élèves peuvent être encadrés d’adultes (enseignants ou surveillants) pour être aidés et stimulés lors de ce temps.

Combien d’élèves j’ai-vu en internat (du lycée) qui revenait nous voir et dire qu’ils travaillaient réellement le soir pendant les études? Beaucoup!

Bien entendu, on préférerait que les parents se saisissent de cela, s’impliquent dans la vie éducative et culturelle de leur enfant.

Là, les élèves stimulent leurs capacités d’efforts face à la tâche, là, ils peuvent être aidés aussi individuellement, là ils peuvent aussi faire preuve d’autonomie « guidée » (d’abord seul face aux exercices et avec un adulte s’il y a un problème pour lui apprendre l’usage d’un cahier de cours ou comment « apprendre »), utile pour le socle:

Un élève qui apprend à être autonome.

Cette solution a plusieurs contraintes :

  • un coût, il faut payer ces adultes.
  • requiert que les transports scolaires puissent s’y adapter (chez nous, les transports posent problème, seuls 30 élèves peuvent bénéficier de ce temps.mais au moins, les enfants sont accompagner.

Et là, c’est ce qui fait que cette solution est décriée et rapidement mis au rebut dans cette période de diète économique….

 

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Les énigmes vidéos, c’est mieux que les énigmes textuelles? Oui, pour les dys et bien plus!

cinema1[sommaire]Voilà pendant ces vacances, j’aurais conçu des énigmes vidéo (dont une avec mon frangin).

Pourquoi ne pas faire simplement un énigme écrite? Pourquoi ne pas continuer mes problèmes de recherches et d’estimations?

Il est vrai ces dernières étaient plutôt une réussite, même si on ne les a pas reconduites cette année. Je reste persuadé qu’elles sont utiles comme tâche complexe, mais pour cela je vous invite à un article que j’avais écrit il y a un peu moins d’un an.

Alors pourquoi avoir dévié vers la vidéo?

Je pourrais répondre brièvement que le projet BREFbref m’a fait découvrir les joies du montage, de la mise en scène  (Une passion de la réalisation que j’avais en moi depuis longtemps ) et que c’est la raison de cette déviation.  Mais en fait, ce n’est vrai qu’en partie…..

La vidéo a pour moi plusieurs utilités :

->Sur la prise d’informations :  « Elle en donne trop, elle en cache.! »

En fait dans une vidéo, on doit observer et aussi écouter. Faire appel donc à un sens qu’on a peu l’habitude d’utiliser : l’ouïe.

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ette prise d’informations se fait en 2 étapes :

  1. – extraire les informations en faisant attention de bien tout extraire, comprendre le contexte de la situation de problème en utilisant la vue et l’ouïe.
  2. – filtrer les informations seulement utiles au problème.

Généralement, la première étape dans une énigme écrite se résume à localiser  les nombres et le vocabulaire mathématique pour extraire les informations associées.

C’est à la fois simple mais malheureusement difficile pour les dyslexiques.

Une vidéo évite la lecture d’énoncé, fait appel à des sens que les dyslexiques savent aussi bien utiliser que les non-dys. Malgré leurs différences, ils sont sur le même pied d’égalité.

->Le développement des élèves :

On attend des élèves qu’ils puissent réagir, qu’ils prennent des initiatives et surtout que dans la vie de tous les jours, ils puissent résoudre les problèmes qu’ils rencontrent. Des objectifs que fixe le socle commun!

Et surtout du bon sens !!!  Depuis quand les problèmes que l’on rencontre sont écrits?

anglemortJe me rappelle un jour, je voulais modéliser mon appartement un peu biscornu sur sweethome3d. Un obstacle de taille : aucun angle droit dans les angles des pièces! Comment mesurer ces angles? Passer un rapporteur est impossible! (Voyez sur un papier, c’est tellement simple!). On a dû donc utiliser une équerre et créer un triangle dont on pouvait mesurer les côtés. Un coup de trigo et le tour était joué.

Comment en faire un texte sans donner l’astuce de l’équerre?

La vidéo va de soi! On présente le contexte visuellement et les essais infructueux (pas de rapporteur possible….)

Bref, une vidéo confronte les apprenants sur des situations concrètes, qui font sens du point de vue mathématique, on voit ce qui se passe comme dans la vie de tous les jours.

->La richesse des égnimes :

Et oui, là où l’énoncé écrit doit être lisible et concis (plus c’est long, plus c’est dur), la vidéo, elle, permet de montrer (une action), de dire, d’écrire.

Bref avec plus de sens tel l’ouïe et la vue, on peut diffuser deux fois plus d’informations en un minimum de temps.

Voyez la dernière vidéo que j’ai faite avec mon frangin :

On retrouve :

  •  le plateau de l’échiquier (les pions en arrière plan devrait aider) et non d’un plateau de dames.
  •  l’explication du ‘doublage’ des pièces de case en case à l’oral
  •  l’explication du ‘doublage’ des pièces de case en case en remplissant les premières cases (moment où c’est accéléré)
  •  énigme posée, on recouvre la France? (image faisant appel à la vue pour souligner la question de manière efficace)
  •  2e énigme posée, on recouvre le monde? (image faisant appel à la vue pour souligner la question de manière efficace)
  •  Une donnée : il y a deux avis contraires, les deux solutions sont donc probables, il faut donc montrer qui a raison avec un raisonnement.

[maVideo]https://mathix.org/video/problemes_ouverts/PB_DUDU/PBDUDU1.mp4.mp4[/maVideo]

voir l’article précédent

 

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L’auto-évaluation : un moyen efficace de dialoguer avec l’élève?

reflexionfaite[sommaire]Ca y est, c’est  l’avant dernière réunion du GRAF sur l’évaluation. Deux années riches en enseignements et réflexions. Des individus avec qui on a eu plaisir de collaborer, de discuter, d’ « échanger« .

C’est la dernière ligne droite vers l’écriture finale de notre texte qui sera publié vraisemblablement sur la revue « échanger » de notre académie. Il fallait expliciter les exemples sur l’autoévaluation, la différenciation.

J’avais fait un tout premier jet très brouillon que j’ai donné aux inspecteurs. Je vais donc vous redonner une 2nde version que je vais m’empresser d’envoyer par email à mon IPR que voici :

L’auto-évaluation

Tout d’abord, qu’est-ce que c’est?

C’est tout simplement laisser le temps à l’élève de prendre du recul sur sa copie. En effet, s’auto-évaluer prend du temps et demande aussi à ce que l’élève puisse se relire consciemment :

pas une relecture orthographique mais une relecture pour comprendre les compétences mises en jeu.

Cela nécessite donc des énoncés d’items clairs et identifiables pour l’élève.

Panneau_attention.svgDes compétences globales sont donc à éviter, il faut les décomposer en savoir, savoir-faire et savoir-être qui sont parfaitement compréhensibles des apprenants.

S’auto-évaluer c’est écrire (communiquer) ce que l’on sait faire et ce que l’on pense ne pas savoir faire au vu de la copie que l’on rend. C’est prendre la mesure de ce que l’on a produit de manière précise.

Naturellement un élève est capable de savoir où il a échoué (quel exercice) mais beaucoup moins sur quelle notion il a échoué : un exercice difficile que bien peu d’élèves prennent le temps de faire.

Mise en pratique

Pour cela, un tableau sur le sujet affiche les items évalués comme le sont habituellement mes évaluations. (Les entêtes sont générés par scolatix.org).

A côté de cette colonne d’items, une colonne est réservée à l’enseignant, puis j’ai ajouté une autre colonne pour s’auto-évaluer.

Voici un exemple :

 autoéval

Du point de vue de l’enseignant, il n’y a donc pas d’autre chose que de produire des énoncés parfaitement clairs.

Le but de ce type d’autoévaluation :

Il permet de mettre en regard la perception qu’à l’élève de lui-même et de la perception qu’à l’enseignant de ce dernier.

 

En effet, en cas de différence flagrante, comme ici sur : « Effectuer une soustraction de nombre relatifs », l’élève est venue d’elle-même s’informer pour savoir pourquoi il y avait une erreur. Un dialogue constructif est donc né et c’est le but de cet outil. Comment aurais-je pu savoir sinon qu’elle pensait avoir cet item?


Bien entendu croire que tous les élèves s’approprieront cet outil est un leurre. Nombre d’entre eux peine à s’auto-évaluer ou même en voit un intérêt. La seule « carotte » que j’ai pu instaurer c’est d’en faire un jeu. « Essayez de trouver ce que je vais mettre! ».

Est-ce que cela permet de faire une relecture efficace pour tous les élèves?

La réponse est non, seule une petite partie s’en sert de manière efficace et raisonnée. Généralement, ce sont les bons élèves car ils ont le temps et ont assez de recul pour s’essayer à cette pratique.

Est-ce qu’il faut continuer?

Mais malgré tout je continue à mettre cette auto-évaluation à chaque évaluation. Pourquoi? La raison est simple, cela entraîne une partie des élèves à cette pratique, certains progressent dans ce domaine, ceux qui ont le temps, disons que c’est une différenciation du devoir  tout simplement.

Et vous, vous en faites ?

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Je suis démago…

L’idée de cet article m’est venu suite à la lecture de l’excellent livre « Collège Brutal » de Maya Goyet. Un bijou rempli d’expériences vécues, où le prof, sarcastique, avoue aussi être un peu démago, alors je sors en quelque sorte du placard…. J’ai repris son ton abrasif.

*

Ça y est le constat est tombé, en fait je suis démago. Le prof-théâtral blagueur est démasqué … « Démago » la quasi-insulte qu’on se dit entre collègues : « T’as vu lui le gros démago » « Pff, c’est qu’un démago de t’ façons » « Rhô le démago!!! »

Oui, je suis démago (un peu) et en fait je n’ai plus peur de le dire. Pourquoi ne pourrait-on pas l’être?

Aurait-on peur que les élèves apprécient le cours non pas pour la discipline que l’on enseigne (il est vrai que les maths c’est ce qu’on fait de mieux, c’est beau, c’est magique, c’est rassurant… par rapport au Français, facile de faire mieux non?, Et toc!) mais pour le plaisir tout simplement d’y être?

Je vois déjà certains collègues fustiger que l’on doit transmettre l’amour de sa discipline. Oui mais le peut-on pour tous? J’ai adoré l’histoire-géographie, les maths, les SVT, la physique-chimie, l’espagnol! Mais ce furent 7 années de torture pour moi avec le français et l’anglais. Pourtant rien y a fait et ce malgré d’avoir eu de bons profs. Je le reconnais avec recul.

Est-ce que les professeurs ont mal joué leur rôle?Je ne le pense pas, peut-on obliger un enfant à adorer tout ça?

C’est un peu comme les goûts, il y a les matières que l’on aime et d’autres non. Bien entendu, on peut aimer une matière grâce à un bon prof. D’ailleurs lors des rencontres parents-professeurs, certains m’avaient dit que leur enfant avait renoué aux mathématiques grâce à moi, j’avais « un bon feeling avec lui« . Les parents disaient qu’il venait avec plaisir en cours.J’ai souri, car c’est un coup de chance, des fois ça marche, des fois non. Le plaisir vient parfois donc du prof…. Dommage qu’il n’en soit pas autrement, mais ce sont des ados, tout simplement.

*

 J’en souris en y pensant. Il faut voir mes cours avec mes 5e, on y parle de guerre, d’arnaque, d’ascenseur, d’ombre, de lune, de pari, de vote, et d’histoire : un méli-mélo d’histoire, de conte, d’énigmes, de jeux. (Bien entendu quand cela s’y prête, pas assez souvent à mon goût.)

Anecdote concernant l’addition des nombres relatifs :

Je suis en pleine explication sur la guerre que se font les jetons blancs (les -) et noirs (les +)  (j’aurais pu dériver sur la discrimination, on s’aime tous malgré les différences!), je théâtralise, la petite histoire est contée (comptée),il y a un affrontement (un jeton blanc et un noir s’annulent), il faut savoir  qui est vainqueur!

Les élèves sourient en me voyant m’agiter avec mes « PAFS!! ils se tuent mutuellement et eux aussi, et attention fermer les yeux c’est sanglant » ( et rayer au rouge les jetons disparaissant).  Bien entendu on est loin du rôle du professeur sérieux, j’aurais pu parler placidement de guerre, créer l’image mathématique de l’annihilation de jetons de couleurs différentes. Quel avantage j’y vois?

Celui de créer une empreinte visuelle et auditive et d’accentuer sa ténacité par l’émotion (positive).

*

Je reprendrais une autre anecdote :

On est sur la soustraction des nombres relatifs, je me suis gauffré, un essai tenté et bien raté, un bon tiers de la classe est perdu et ce, malgré deux points de vue élaborés sur la soustraction. Je voulais tout d’abord éviter de donner trop vite la transformation de la soustraction en addition.

Je l’ai donc évoquée, je ne voulais pas que les élèves partent en vacances (c’était le dernier cours avant les vacances) avec un a priori négatif et qu’ils soient en total rejet à la rentrée. Je balance quelques exemples très rapides et fait remarquer que (-4)-(-5) = (-4)+(+5), j’institue très rapidement le mécanisme. Un élève lève la main et me dit que c’est une arnaque. J’ai souri, j’ai acquiescé. L’expression est restée.

J’ai entendu des « On peut utiliser l’arnaque au contrôle , monsieur? » « Mais l’arnaque, ça marche bien, en fait » ou  » Je préfère retirer des jetons que d’arnaquer« . J’ai parlé de transformation de soustraction en addition, mais les élèves ont retenu l’expression « l’arnaque » , même moi parfois je me mets à l’utiliser et… et alors?

Quand le sens de cette transformation viendra, ils sauront faire le lien entre le mot arnaque et transformation. Oups, mince certains appliquent sans comprendre…

Oui, j’en conviens, mais parfois le sens vient après. »Vous ne vous rappelez pas des déclics que certains ont en cours? » C’est juste que le sens ne leur  était pas parvenu, même si votre cours était superbe, un élève n’est pas forcément prêt à tout entendre de suite, ce n’est pas une machine.

Et puis,zut! J’ai envie de rire en cours, j’ai envie que les élèves rigolent, soit contents de venir que ce soit un plaisir de venir au collège!

Pourquoi cela devrait être une atmosphère froide et sérieuse? On peut être sérieux sans se prendre au sérieux et j’agis en ce sens!

*

C’est comme les paris que je lance parfois, sur des problèmes contre-intuitifs pour montrer que l’on peut se faire berner.

Comme par exemple, si on plie une feuille (de 0,1mm d’épaisseur) 22 fois et bien l’épaisseur obtenue dépasse la hauteur de la tour Eiffel et que 43 suffisent pour relier la Terre à la Lune.

J’ai même réussi une année rien qu’avec une classe, à gagner 7 paquets de bonbons, que j’ai refusé, et pour les téméraires qui les ont achetés, je leur ai demandé de distribuer cela aux autres élèves , en clamant : « Dans mon immense générosité (et pour le respect de mes dents), je vous les offre« .

Il n’empêche que les élèves se souviennent de cet événement, attention aux intuitions! Mieux qu’une image mentale!

*

Je me rappelle cette rentrée, je suis Professeur Principal d’une 5e, la plupart des élèves m’ont déjà eu en prof de maths l’année dernière, ils sourient, content de me revoir et moi aussi content de revoir leurs frimousses, même de revoir les élèves à problèmes. C’est le bazar dans le couloir, ils ne se rangent pas vraiment, d’autres collègues à côté, veulent faire de même avec les leurs.

Je joue le général, et leur dit «  Deeeeeux par deux et qu’ça saute! Je ne veux voir que deux têtes! » Les élèves se cachent donc les uns derrières les autres, ils se rangent.J’entends des « vite mets toi là, je file derrière » « Attention il te voit!« .

J’entame mon second ordre « Tenez-vous la main! » Les élèves sourient, rigolent mais ne le font pas. Je les fais rentrer en disant d’un ton faussement sévère « Et Bé vous commencez bien!!!« , les collègues rigolaient à côté, n’empêche que j’étais le premier à faire rentrer ma classe, et pour l’entrée en classe ce n’était pas le bazar, l’image du général était respectée.

Oups mince, ça aurait été mieux que ce soit l’image du prof qui véhicule cela... Moui, m’enfin ils savent que c’est Monsieur Durand qui est là. Il reconnaisse l’autorité, ils se prêtent simplement « au jeu » plus rapidement.

« M’enfin oui, mais tu vois, si d’autres collègues ne font pas ça, ils seront traités de ringards, tu forces la surenchère! »

Mais non, n’ayons pas peur de cela, j’ai juste créé un personnage, mon personnage! Mr Durand, il est comme ça : « marrant mais exigeant » (propos d’un élève de 3e qu’un élève de 5e , son frère, me rapportait).

J’ai créé « mon trou » (5 ans déjà! Bigre…) dans ce collège en ce sens, c’est un repère. Un élève a besoin de repère.

Je vois aussi une autre professeur d’Histoire-Géographie, calme, vieille école, qui vouvoie ses élèves , elle est hyper appréciée, car on sait que Mme L… est comme cela.Peut-être que le côté décalé du vouvoiement y joue. Un personnage de plus. (pour anecdote, la première fois que je l’ai entendu sermonner un élève j’ai cru qu’elle parlait à la classe, quelle surprise quand j’ai regardé dans la salle… Un pauvre élève tout seul face à elle!)

Mes deux autres collègues de maths, ne jouent pas de rôle (quoi qu’on en pense on en joue tous un, mais disons que rien ne les différencie d’un prof dit « classique »), cela ne les empêchent pas d’être appréciées, elles sermonnent, elles encouragent, cela change-t-il quelque chose que je ne fasse pas pareil? Je ne parierai pas là-dessus.

Un autre collègue, lui, il faut le voir, en costume digne digne d’un IPR (la première fois que je l’ai vu, j’ai cru qu’un collègue était inspecté), qui vouvoie aussi ses élèves,  il a offert des bonbons juste avant les vacances de noël, avec sourire, je l’ai traité de démago, car j’ai rien à en dire (quoique moi, Monsieur, je les gagne, les bonbons! Oui Monsieur!)

Mais le jour de mon inspection, j’avais fait un cours sérieux, plat (trop peur d’assumer cela)…. J’ai pas aimé, les élèves ne m’ont pas reconnu. Pauvres 6e, qui m’ont pourtant tout fait pour m’aider, mais ce foutu costume de prof-fonctionnarial ne m’allait pas du tout. Je ne m’y reconnaissais pas.

*

Tout ça pour quoi? Juste affirmer que tous les profs jouent des rôles, plus ou moins sérieux, avec ses exigences et tolérances. Être démago fait pour moi parti d’un personnage. Cela permet aussi de créer des images mentales efficaces, réconcilier des élèves avec la discipline, manipuler parfois pour arriver à nos fins, rendre agréable un cours.

Bien entendu, il y a plusieurs échelles dans la démagogie. Offrir des bonbons à des élèves qui ont obtenu de bons résultats ne me viendraient pas du tout à l’esprit! Je m’y opposerais d’ailleurs fermement.  Il y a des valeurs à transmettre!

Soyons sérieux …. mais sans se prendre au sérieux, tout simplement

demago

Au fait, bonne année!!

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Petit débat sur l’évaluation différenciée et l’évaluation sans note

Au GRAF (Groupe de Recherche Action-Formation sur l’évaluation), nous avons un espace de wiki, qui permet aussi de donner des remarques sur les écrits. J’avais proposé en texte :

« l’évaluation différenciée, pourquoi pas? » qui est devenu un article de mon blog.

Nous avions eu à l’époque à la suite de cet article, une longue discussion avec Pierre. En relisant, les messages, je me suis dit qu’il serait intéressant de les retranscrire, car on remarque l’ensemble des arguments anti et pro-note.

Avant toute chose il serait souhaitable de lire l’article sur l’évaluation différenciée.

Pierre :

Je voulais publier ce texte en « brèves », mais il est trop long… Je me permets de le publier ici.
Je me permets de te répondre en retour en fin de wiki.
Quelques remarques sur le texte « Une évaluation différenciée, pourquoi (pas) ? »
1- Les deux analogies reprises de Perrenoud ne sont pas du tout convaincantes (décidément Perrenoud, dans son ensemble, ne me convainc pas) :
« Est-ce que la médecine fait subir les mêmes analyses à tous les malades sous prétexte d’égalité ? Cela
dépend des personnes, des problèmes. »L’évaluation ne sert pas au diagnostic préalable (sauf l’évaluation diagnostique mais dont il n’est pas question ici) comme les analyses que subissent les malades. Et encore : on utilise un stéthoscope et on mesure la tension chez tous les patients. Ensuite seulement on affine les examens et, surtout, on différencie les traitements.
« Un peu comme le permis de voiture, nous ne le passons que lorsque nous sommes prêts. La validation
du permis confirme notre apprentissage. »
C’est une grossière erreur d’analogie une nouvelle fois : car non seulement on s’adresse à des adultes, mais nul n’est obligé de passer le permis donc on a tout son temps pour le préparer, à tel point qu’on peut s’arrêter et ne jamais le passer.
2- Il est surtout question, dans le texte, du rapport au temps d’apprentissage. Je vois deux points négatifs :

  • a. On peut tourner les choses dans tous les sens, il y a une baisse d’exigence : on ne demande pas à l’élève d’être prêt, on attend qu’il le soit (un collègue ironique me faisait remarquer que pour certains on peut toujours attendre !).
  • b. Dans beaucoup de disciplines on ne peut attendre que l’élève soit prêt. Sauf à parler de compétences générales ou de savoir-faire réutilisés, la progression ne se fait pas en spirale et les chapitres ou les séquences s’enchaînent.

3- Par ailleurs il y a une confusion sous le terme évaluation, entre les évaluations sommatives et les activités qui sont évaluées lors d’évaluations formatives destinées à identifier là où ça coince pour mieux  y remédier.

Cette distinction posée, la nécessité d’enlever les notes au prétexte qu’elles obligent à évaluer de la même manière tous les élèves disparaît : on peut conserver des évaluations sommatives notées (en fin de chapitre ou de séquences, pour situer l’élève par rapport aux objectifs de connaissances) et différencier par les évaluations formatives. On peut aussi valoriser par des petites évaluations favorables aux bonnes notes.

En effet rien n’empêche – et beaucoup de collègues le font – de donner des évaluations, simples et rapides, qui sont facilement gratifiantes :

  • devoir en fin d’heure sur le cours qui vient d’être fait (valorise l’écoute en cours) ;
  • interrogation en début d’heure sur des définitions du cours (valorise le travail perso) ;
  • faire refaire un devoir avec le cahier de cours : montrer à un élève l’absence de fatalité d’une mauvaise note ;
  • TP notés en sciences permettant d’évaluer des capacités techniques et qui sont souvent très valorisants.

4- Un argument avancé est qu’un élève peut être démotivé par de mauvaises notes et s’enfermer dans l’échec.

a. Mais il y a une inversion du rapport cause/conséquence. Ce sont surtout, le plus souvent, ses faibles compétences ou ses lacunes notionnelles qui l’enferment dans l’échec. Et c’est l’accumulation des lacunes qui l’empêche de sortir de son échec, quand bien même il est valorisé (c’est là une limite à la valorisation).

Le « j’ai toujours de mauvaises notes », dès qu’il est creusé, est compris par l’élève : il n’y arrive pas à cause de ses lacunes. Je crois que l’élève sait qu’il ne sait pas. Et c’est parce qu’il sait très bien ce que sont ces lacunes qu’il se sent condamné et qu’il se voit enfermé dans la « spirale de l’échec ».
Il y a bien sûr des cas où un élève a bien travaillé, où il pense avoir compris et échoue pourtant lors d’une évaluation : c’est tout le rôle des évaluations formatrices d’identifier les lacunes notionnelles ou méthodologiques pour mieux y remédier.
b. J’ai aussi l’impression (dans cet article en filigrane mais aussi dans de nombreuses autres discussions) que la volonté de valoriser  est parfois telle qu’il semble que l’échec soit interdit parce que la mauvaise note est refusée au prétexte qu’elle détruit le moral des troupes. C’est mettre très haut l’importance de la confiance en soi (sans doute parce que l’un des grands enjeux est maintenant que
l’élève « soit bien » à l’école) : la raison d’un échec n’est pas la perte de confiance.

5- Dernière remarque, qui découle des précédentes : mais si la note est si fondamentale et semble
affecter tant, peut-on réellement valoriser un élève autrement que par la note ? Ce qui le gratifiera
réellement (i.e. : ce qui le mettra réellement en confiance) : n’est-ce pas une bonne note, bien plus
qu’une couleur verte ?

Ma réponse :

REMARQUES SUR LES REMARQUES … (Arnaud Durand)

Tout d’abord, quitte à me répéter, l’évaluation différenciée au même titre que l’évaluation sans note n’ont
aucune prétention à être parfaite. Elles s’axent sur un autre objectif : celui, pour moi, de la prévention du
décrochage. (lire, « l’évaluation, une menace? », même si je ne suis pas d’accord sur tout notamment la
description des rapports individu-individu en faisant fi du regard groupe-individu, je n’ai pas encore tout lu
mais le décrochage mu par l’évaluation sociale est extrêmement bien décrit)
Mais avant d’aller plus loin, j’aimerais préciser tes propos,voyons plutôt ce que je lis.
1- Je lis que la gratification peut passer par des évaluations favorables aux bonnes notes. De quoi s’agit-il?
Appuyer sur la balance pour la faire passer au vert, inventer des items de bon comportements qui n’ont peut-être pas rapport aux objectifs du programme ou du socle?
Que signifie réellement la moyenne de notes si celle-ci s’articule autour d’évaluations de tâches simplifiées? N’y a-t-il pas là ici aussi comme tu pourrais l’écrire une baisse d’exigence? J’y reviendrais plus tard, pour y relever ce que j’y vois de positif.
2- Le fameux argument qu’un élève peut être démotivé par de mauvaises notes et s’enfermer dans l’échec….
On parle bien de s’enfermer dans l’échec, nullement il a été question que les mauvaises notes sont la raison de l’échec (aucun lien de causalité comme tu prétends) mais plutôt la non-résolution de la situation d’échec.
L’élève est dans l’échec et peine à en sortir. On parle bien de spirale négative. Être en confiance permet d’aller de l’avant, c’est justement le levier pour sortir de l’échec. Un élève qui n’est pas en confiance n’a pas les moyens de réfléchir car ses pensées sont accaparées par les émotions liées à l’échec, donc son potentiel de réflexion est altéré, ce qui ne lui permet d’avoir de solides bases pour progresser : être en disposition pour agir.
Imaginons-nous faibles (situation d’échec donc) , mais travailleurs (j’en reviens toujours aux faibles-bosseurs, comme on en avait parlé lors de cette 2e journée, ce sont eux mon vrai « problème »), on travaille beaucoup, on y met de la volonté et pourtant, on a des notes peu glorieuses 6/20 , 3/20 etc …, est-il possible de ne pas jeter l’éponge? Oui peut-être … mais quelle force de caractère faut-il! Les élèves ont-ils tous cette aptitude face à l’échec? Clairement non.
Un exemple plus concret : on parle bien des filières prépa-maths dont le niveau exigé est dingue. Les élèves pourtant brillants se trouvent avec de notes extrêmement pauvres, ils deviennent dans la micro-société qu’est la classe des élèves nuls, certains décrochent et quittent ces filières.
Dans un contexte de compétition que ne renie pas ce genre de filière, c’est « normal » , ici, on est au collège, pour tous les élèves et surtout pour les aider, il faut donc ici prévenir le décrochage que l’instituer, non ?
On pense évaluation différenciée pour justement tourner le regard de l’élève vers ses performances et non ses contre-performances, il ne s’agit pas de le leurrer (il n’y a pas de note! Donc pas de faux espoir parde petits plus non-sensés! Un avis objectif sur les objectifs du programme : maîtrisé, non maîtrisé etc).
Justement j’en reviens à tes évaluations qui « donnent » de bonnes notes, elles sont tournées vers ce qu’ils savent faire… non ? Sauf que chez toi, la fameuse moyenne en est faussée, il y a un leurre.
S’empêcher d’évaluer une notion pour laquelle un élève n’est pas prêt. Ton collègue parlait que l’on pouvait attendre longtemps pour certains, de les évaluer cela a-t-il modifié quelque chose, sinon d’avoir une mauvaise note pour eux? Sincèrement y vois-tu une utilité ? Moi, aucune.
Si à la fin de l’année, l’élève n’a pas été évalué sur des notions car il n’était pas prêt et bien tout simplement il n’a pas les requis nécessaires. Je ne vois en quoi ne pas l’évaluer institutionnellement, nous empêche de se prononcer sur un élève. Cela t’empêche ?
3- Je lis « L’échec est interdit... » et « La mauvaise note est refusée« . C’est placer bien bas l’évaluation sans note…

Un « non-évalué » est peut-être aussi important qu’un « maîtrisé ». L’absence de performance est préférée à la contre-performance. Nos élèves, ici, sont en construction et en stade d’apprentissage, ils peuvent donc maîtriser plus tard les notions. Il s’agit donc de les orienter comme une évaluation diagnostic le permettrait.
Une note (parfois sanction) ne permet pas, à mon avis, de laisser la chance aux élèves maîtriser plus tard. Chez un adulte, peut-être que notre évaluation tournera autour de la performance et de la contre-performance, car ici l’adulte n’est pas considéré en stade d’apprentissage, donc la note pourrait avoir un sens, encore que…
4- Tu parles d’évaluation diagnostic et sommative… Pour une « évaluation sans note », la différence entre les deux devient extrêmement étroite, les élèves d’ailleurs ne la voient pas, pour eux, ils se contentent de savoir ce qu’ils faut retravailler pour obtenir plus tard l’objectif qu’il n’avait pas atteint en cette évaluation. N’est-ce pas le premier objectif de l’évaluation, centrer l’élève sur un axe de progression ? La vraie évaluation diagnostic !
Pourtant elle est aussi sommative car il y a bien un jugement des performances. Bien-entendu cela suggère des évaluations régulières que ma discipline permet au contraire de la tienne.J’en ai parlé à un enseignant de sciences physiques qui évalue avec Scolatix. Bien entendu pour lui la notion d’évaluation spiralée lui est étrangère comme toi je suppose. Néanmoins il y voyait des avantages :
Cibler les domaines de prédilections de ces élèves.(électricité, optique, chimie…) à mettre en lien avec des orientations  professionnelles.
Évaluer les comportements lors de TP, et ces compétences (socle) sont évaluables plusieurs fois. Enfin, comme je te l’avais suggéré, avoir 7/20 tout le temps pour un élève, il ne se verra pas progresser, alors qu’en évaluant par objectifs, ici il verra la progression du savoir grandir : il progresse, même si bien entendu, c’est insuffisant comme le suggère les notes, se savoir en progrès est plutôt positif, non ?.

Nous sommes en accord sur de très nombreux points :

  • La différenciation des évaluations ;
  • L’évaluation par compétences ;
  • L’identification des difficultés par l’évaluation des compétences ;
  • Une remédiation différenciée ;
  • La valorisation des élèves (en proposant cette définition de valorisation : veiller à ce que l’élève prennent bien conscience de ses qualités et de ses réussites).- Je suis d’accord pour constater que, sur les élèves faibles-bosseurs, les notes ne permettent pas de voir leurs progrès. C’est à mon sens le vrai argument en faveur de l’évaluation par compétence (ce qui n’a rien à voir avec l’absence de note !).

D’ailleurs je fais beaucoup d’évaluations formatives, en utilisant un code couleur, sur telle ou telle compétence ou capacité.
(Malgré un bémol cependant dont il faudra reparler : l’évaluation de certaines compétences se heurte à un effet de seuil, de sorte que la progression n’apparaît plus.)
En fait ce sont les excès qui me laissent perplexe :

  • Valoriser : oui mais à quel point ?
  • Les notes sont insuffisantes, mal adaptées, peu précises. Certes, mais de là à les supprimer ?

Je ne suis donc en désaccord que sur un point essentiel :

Il y a ce qu’on voit (le désavantage de la note pour les faibles-bosseurs) et il y a ce qu’on ne voit pas (les avantages de la note pour d’autres élèves, ou pour les parents, etc.). De sorte que je ne vois pas pourquoi, au prétexte qu’elles ne sont pas adaptées à quelques uns, il faut supprimer les notes de tout le monde. C’est postuler qu’il y a davantage à gagner à supprimer les notes qu’à les garder : rien n’est moins sûr.

Évaluer par objectif n’inclue pas forcément la suppression de la note globale mais surtout celle de la note instantanée (celle de l’évaluation x ou y ).
Est-ce que les parents s’en contentent?
Oui pour ceux qui suivent la scolarité de leurs enfants.
Ceux qui ne regardent pas les résultats notés de leurs enfants, ne regardent pas plus les résultats non notés (d’ailleurs ils s’en servent comme excuse, ces parents, on les connaît depuis la 6e et l’expérience n’est faite globalement qu’en 4e)
L’évaluation par objectifs n’est pas un remède, mais il a au moins l’avantage de cibler les lacunes de façon durable, facile pour un élève de cacher, d’oublier un résultat d’évaluation où l’on écrit les objectifs qui n’ont pas été atteints. Ici, le bilan des savoirs (savoir, savoir-faire et attitude) est accessible tout le temps, difficile de ne pas le voir.
On peut donc plus facilement impliquer l’élève dans son apprentissage. J’ai eu aussi des retour d’élèves de 3e (d’anciens 4e), ceux qui ont des  difficultés ( ceux qui n’en ont pas, n’ont pas à ré-approfondir des notions non acquises), apprécient (soyons honnêtes , pas tous, les autres s’en moquent comme ils se moquent des notes, ou autre) ce genre de bilan pour avoir des axes de travail, de révisions.
Je n’ai pas l’impression que la note instantanée (pour une évaluation) soit un réel avantage sur la « communication », ou sur la mise au travail des bons élèves (je pense au stade de maîtrise : acquis ou expert) etc… mais on en reparle mardi .

Et on en a parlé mardi et encore les séances suivantes…

J’allais oublier :

Bonnes fêtes de fin d’année!

noel

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Lorsque l’enseignant bidouille les notes

stylo[sommaire]Une journée du GRAF qui se termine, une journée forte intéressante, tant les débats étaient sérieux et argumentés.

Toujours ce Pierre, l’opposant à l’anti-notele groupe anti-note et… moi un peu entre les deux avec mon expérimentation scolatix où la note trimestrielle (que je voudrais annuelle ) est gardée mais où les notes ont disparu des devoirs.

Pierre, que j’apprécie beaucoup pour le rôle qu’il joue dans ce GRAF, celui qui oblige a poser le débat et éviter de perdre pied dans notre engouement à tout modifier. Il s’agit d’avancer en posant les idées solidement.

Le GRAF

outils_imagesJ’aimerais maintenant témoigner d’un passage important où les arguments contre la note furent vraiment intéressants qui relevait une pratique connue de nous les enseignants : la bidouille.

Replaçons-nous dans le contexte, les IPR présents nous demande de réfléchir sur le pourquoi de nos expérimentations sur l’évaluation par compétences.

note20scolaiPierre comme à son habitude relance ses arguments  « Je ne sais pas pourquoi la note serait catastrophique, elle a aussi des bons côtés et on peut évaluer par compétences avec des notes. Elle peut servir de récompense, et est en quelque sorte universelle (du point de vue de la compréhension)« .

La réponse fuse, moi et le reste du groupe anti-note « Que fais-tu des échecs qui pénalisent la note trimestrielle?« .

Sa réponse : « Et bien, si réellement c’est un accident, je mets non noté« 

Puis au fur et à mesure Pierre remet sur le tapis une idée que j’aime beaucoup (qu’un inspecteur il y a 4 ans m’avait évoqué lors d’un entretien) :

De toute façon, nous, les enseignants,  connaissons le mieux les élèves, on est capable de savoir quelle note trimestrielle correspondrait au niveau des élèves, il s’agit de la leur mettre si l’on veut.

En fait tout simplement nous faire confiance dans le jugement que l’on porte sur les élèves, nous sommes normalement expert en ce domaine.

Qui n’a pas entendu au conseil de classe,  » Je précise sa moyenne ne reflète pas son niveau, il a eu un accident, vraiment ça me désole qu’il ait cette moyenne » ou même « Il a loupé plein de devoirs, et donc il a une très bonne moyenne alors qu’il ne devrait pas« ?

Bref, on peste contre cette fabrication de cette moyenne, on peste car on se refuse de la contrôler.

Certains, comme Pierre, osent manipuler les notes pour que cela reflète le ressenti qu’ils ont de l’élève, d’autres se font violence et subisse le système de la moyenne au grand dame de l’enfant.

Pourquoi subir? Qui nous impose de faire une moyenne?

Ce que devrait refléter la note trimestrielle :

D’abord afin de ne pas enterrer la note j’aimerais avancer un argument de l’inspection générale :

« La note est … relative, peu fidèle, peu explicite. Et pourtant elle est admise par tous, élèves, parents, enseignants, chefs d’établissement. C’est le support de (presque) tout dialogue sur les acquis des élèves ».[1]

Il s’agit donc de se dire que la note est un moyen universel de dialogue, compréhensible par les allophones, et les personnes dont les appréciations leurs seraient incompréhensibles.

C’est là que notre petit groupe s’est scindé, j’étais comme Pierre favorable à l’utilisation d’une note bulletin qui pourrait évoluer tout au long de l’année. Pierre semblait donc convaincu par mon idée, mais il se refusera sûrement d’y adhérer totalement, j’étudierai les raisons après.

Bien entendu les professeurs de l’expérimentation sans note présents , nous ont affirmé qu’un bulletin sans note (avec des couleurs ou pour d’autres seulement avec des appréciations) que le conseil de classe se passait de manière identique et les parents regardaient d’avantage les appréciations.

C’est un atout certain. Mais pourquoi une note ne refléterait pas le niveau d’acquisition de l’élève (un pourcentage d’acquisition?) et l’appréciation se limiterait à décrire l’évolution de l’élève au cours du trimestre et son attitude face au travail et chez lui ( les compétences transversales et interdisciplinaires)?

 On garderait donc les mêmes bulletins de classe, mais la note représenterait exactement l’idée du niveau d’acquisition de l’élève.

Mais pourquoi Pierre ne passe pas à l’unique note représentant le bilan d’acquisition de l’élève?

Une histoire de … discipline

Tout est là! Pierre est un professeur des SVT, son programme lui est scindé en séquence autonome où les connaissances ne se chevauchent pas, les seules compétences transversales sont au nombre de 3 :  Réaliser, Raisonner, Communiquer. Elles sont d’ailleurs relatives au Socle Commun de Connaissances.

Une discipline où il est difficile de « spiraler », l’utilité de l’évaluation par items en devient diminuée. Ma discipline étant les mathématiques, spiraler les connaissances est aisé, et donc permet aux élèves de pouvoir récupérer des échecs…

Un collègue de sciences physique-chimie qui lui évalue comme moi selon l’expérimentation scolatix a les mêmes sensations que Pierre, néanmoins cela lui permet de voir les profils des élèves (ceux ayant plus d’aisance en électricité, optique ou chimie …)

A ceux qui disent qu’une note seule ne veut rien dire!

Je suis parfaitement d’accord!

C’est d’ailleurs le but de scolatix, avoir différents paliers de précision dans la visualisation du niveau d’acquisition :

  1. un global (la fameuse note ou pourcentage)
  2. un intermédiaire (les items sont regroupés en thème, on ne voit donc que le taux d’acquisition de chaque thème)
  3. un précis (on voit les acquisitions de chaque item).

directionLes expérimentations sans note, se sont confrontés à un dilemme :

  • avoir un livret de compétences avec beaucoup d’items qui rend difficile son appréciation globale. (il manque un bilan global pour les parents qui se questionnent en disant aux enseignants, alors c’est bien ou pas?)
  • avoir un livret plus succinct, mais quand il s’agit de sa voir précisément quoi retravailler, on sait plus. (Oui, d’accord la manipulation des nombres n’est pas acquise, mais sur quel type de nombre?Quelle opération?)

Cette journée m’a convaincu d’autant plus du bien fondé de mon expérimentation ou du moins de l’axe de progression choisi.

Et vous, vous en pensez quoi?objectif4

 

[1] : IGEN 2007, Les livres de compétences : nouveaux outils pour l’évaluation des acquis, inspections Générale de l’Éducation Nationale, Rapport à Monsieur le Ministre de l’Éducation Nationale

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